23.11.11

La mère de famille garde-malade

C'est encore à la femme qu'incombe dans les familles la belle et importante mission du soin des malades. Sa main délicate, son adresse, son cœur compatissant et bon lui donnent accès naturellement près de tous ceux qui souffrent. Son dévouement est à toute épreuve. Debout, auprès du lit de son cher patient, elle épie ses moindres paroles, devine ses besoins, va au-devant de ses désirs et passe les nuits sans se plaindre, on dirait sans se fatiguer, tant elle y met de persévérance. L'homme malade voit ses forces s'en aller, ses facultés se troubler ou s'affaiblir, et sous l'empreinte de la souffrance son caractère devient susceptible, irritable. Combien il est heureux alors d'avoir près de lui sa femme, qui devient sa garde et qui, à côté des soins matériels qu'elle lui prodigue, relève son moral abattu, l'encourage et le fortifie!

Ah ! chères enfants, ne reculez jamais devant cette fonction de gardes-malades, puisque toutes les femmes à une époque de leur vie sont appelées à la remplir, soit comme épouses, soit comme mères ou comme filles.

Lorsqu'on donne ses soins à une personne aimée, le cœur suggère vite ce qu'il y a de mieux à faire ; mais pourtant il faut dire que l'art de soigner les malades ne peut s'improviser complètement, il y a un savoir-faire à acquérir. En Allemagne, il existe des écoles de gardes-malades, d'où les femmes d'un âge mûr sortent après plusieurs années d'études spéciales, munies d'un brevet de capacité ; il y a aussi à Paris des cours spéciaux de ce genre. Cependant, en France, ce sont généralement des religieuses qui remplissent l'office de gardes-malades.

Une jeune dame disait un jour : « Moi, j'ai le malheur d'être trop sensible, il m'est impossible d'aller visiter une personne dangereusement malade et surtout de voir un mort. » On lui répondit : « C'est vrai, madame, c'est un spectacle douloureux que d'être près d'un mourant ou d'un mort ; mais il est des devoirs avec lesquels on ne doit pas transiger, quoiqu'il en coûte ; il faut aguerrir son cœur contre une sensibilité exagérée, et, dans ces heures pénibles pour le cœur, la raison doit dominer les impressions. Quoi de plus ridicule qu'une personne qui n'ose toucher à une sangsue, qui s'évanouit en assistant à une saignée, qui se plaint de maux de cœur en voyant une plaie ; ce n'est pas là de la sensibilité, c'est de la faiblesse et de l'enfantillage. »

Terminons par quelques conseils pratiques :
La douceur est une qualité essentielle près des malades. Douceur dans le ton de la voix et dans les paroles : il ne faudrait parler aux malades que comme aux petits enfants délicats, avec une voix posée, calme, peu bruyante et qui ressemblât presque à un sourire. —Douceur dans les manières : une main légère qui touche sans appuyer, qui est active sans précipitation, qui va doucement, sans lambinerie, est une des qualités les plus précieuses. —Douceur dans le caractère : pour ne pas se fâcher d'une parole un peu vive, d'une injustice, ni de ce que le malade se plaint de vous, ni de ce qu'il préfère les soins d'un autre à vos soins à vous, ni de ce qu'il est trop exigeant.

Une garde bonne et dévouée trouve dans son cœur des ressources ingénieuses : elle a toujours des faits à raconter, des paroles aimables à dire : elle entre dans la manière de voir du malade, riant quand il sourit, le plaignant quand il se plaint, l'écoutant surtout avec un empressement marqué quand il parle de lui, et cela d'une manière naturelle, paisible, affectueuse qui a la puissance souvent de faire oublier au malade ses souffrances.

Lorsqu'une personne est sérieusement malade, la porte de sa chambre doit être soigneusement fermée à tous les visiteurs ; ils peuvent être reçus dans une pièce à côté. Le moindre bruit, les allées et venues fatiguent le patient. Il faut aussi que les membres de la famille qui l'approchent ne laissent voir ni les craintes qu'ils ont, ni la douleur qu'ils éprouvent ; leur visage doit refléter une sérénité qu'ils n'ont pas au fond du cœur. Les yeux des malades sont très perspicaces, ils cherchent à lire sur votre physionomie ce que vous pensez de leur état. Faites en sorte qu'ils n'entendent jamais de mot qui puisse les faire croire à leur fin prochaine. Ah ! laissons à nos chers malades, laissons-leur du moins l'espérance, la plus consolante des vertus et celle qui reste la dernière!
Tiré du Savoir-faire et le savoir-vivre, de Clarisse Juranville

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