7.5.14

Un enfant apportera le bonheur dans la paix

Écrit en l'an 37 avant Jésus-Christ.

Le dernier âge prédit par la Sibylle est arrivé : le grand ordre des siècles recommence.
Déjà revient aussi la Vierge, revient aussi le règne de Saturne :
déjà du haut des cieux descend une nouvelle race.

Chaste Lucine, favorise seulement la naissance de cet enfant sous lequel cessera l'âge
de fer et renaîtra l'âge d'Or pour le monde entier.
C'est sous tes auspices que les traces de nos forfaits, s'il en reste encore, disparaîtront pour toujours,
délivrant l'univers d'une éternelle alarme.

Cet enfant vivra de la vie des dieux, il verra les héros mêlés avec les dieux ; ils le verront lui-même
et il gouvernera le monde pacifié par les vertus de son père.

Enfant, la terre t'offrira le lierre, mêlé aux plantes d’Égypte et de Grèce, les chèvres apporteront
leurs mamelles pleines de lait, les troupeaux ne craindront plus le lion superbe,
et ton berceau sera couvert de fleurs caressantes. La grappe vermeille se suspendra aux buissons incultes
et les chênes durs laisseront perler une rosée de miel.

Toute terre produira toutes choses. Les champs ne sentiront plus la herse, ni la vigne la serpe,
les taureaux seront libérés du joug, dans les prés, le bélier changera lui-même la couleur
de sa toison de laine, etc.

Cher enfant des dieux, prépare-toi aux magistratures suprêmes, noble rejeton du grand Jupiter,
vois comme tout se réjouit de la venue de ce siècle.

Que le cours de ma vie soit assez long pour célébrer tes actions par mes chants, que ne vaincront
ni ceux du thrace Orphée, inspirés par sa mère Calliope, ni ceux de Linus inspirés par Apollon,
ni même ceux de Pan qui au jugement de l'Arcadie s'avouerait vaincu.

– VIRGILE (70 – 19 av. J.-C.), Bucolique IV


A cette même époque et de façon tout-à-fait indépendante, la sibylle grecque Tiburtine
avait annoncé à Octave la venue du Christ, messager de paix.

--
"Le loup habitera avec l'agneau, [...] Et un petit enfant les conduira." (Esaïe 11.6)
--

XVIII 
Dans Virgile parfois, dieu tout près d’être un ange,
Le vers porte à sa cime une lueur étrange.
C’est que, rêvant déjà ce qu’à présent on sait,
Il chantait presque à l’heure où Jésus vagissait.
C’est qu’à son insu même il est une des âmes
Que l’orient lointain teignait de vagues flammes.
C’est qu’il est un des cœur que, déjà sous les cieux,
Dorait le jour naissant du Christ Mystérieux!
Dieu voulait qu’avant tout, rayon du fils de l’homme,
L’aube de Bethléem blanchît le front de Rome.

Nuit du 21 au 22 mars 1837
– VICTOR HUGO

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Si cela vous a plu, touché, instruit--laissez-moi un commentaire !